Sémiosine

“Fash pack” : le mot qui en dit long #1

Mot nouveau, mot emprunté, mot ressuscité, mot incongru… «Le mot qui en dit long», ce sont des histoires de mots qui disent beaucoup sur l’époque et ceux qui les prononcent… Aujourd’hui, c’est “fash pack” qui ouvre le bal.

Dans son numéro du 15 juin, le magazine Elle nous présente le mannequin Ashley Smith : « La top américaine, égérie du parfum Loverdose de Diesel, affole le fash pack avec son style rock, ses courbes gorgeous et sa moue ravageuse. »

Fash pack. Mmmm. Je ne lis pas Elle de fond en comble mais tout de même, je crois bien que c’est la première fois que “fash pack” surgit ainsi, dans un chapo, sans guillemets ni italique.

Ce détail a son importance : les guillemets auraient marqué une distance, celle que la rédaction aurait jugé bon de placer entre ce mot et ses lectrices, comme pour leur dire : nous savons que “fash pack” ne fait pas (encore) partie de votre vocabulaire. L’italique aurait signalé l’altérité de ce terme, son appartenance à une autre langue que celle des lectrices lambda : la langue que l’on parle dans les milieux de la mode et assimilés.

Le “fash pack”, diminutif de “fashion pack” (pack au sens de “bande”), ce sont les gens influents, professionnels de la profession (créateurs, rédactrices de mode, attachés de presse, etc.) ou personnalités du show-biz. Bref, ceux que l’on trouve aux premiers rangs des défilés.

 

Pourquoi Elle grille-t-il une étape en nous imposant ce mot sans traduction, sans distance, comme s’il était parfaitement naturel alors que ce n’est pas vraiment le cas ? Peut-être pour rester à la hauteur. Imposer sa langue est le fait des prescripteurs, des médias que l’on suit parce qu’ils ont une longueur d’avance sur nous.

Quelques semaines plus tôt (le 9 mars), le mot “fash pack” était apparu dans Grazia, tout autant dépourvu de guillemets et d’italique, négligemment lancé dans le cours d’une phrase. Lorsque je repense à la façon dont l’expression “color block” s’est répandue comme une traînée de poudre dans toute la presse féminine en 2011 (Madame Figaro avait alors tiré le premier), je suis loin de croire qu’il s’agisse d’un hasard.

 

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