La galerie des plaisirs de Roquefort Société

A l’occasion de l’anniversaire de ses 150 ans, Roquefort Société lance une campagne publicitaire créative qui nous révèlera tout au long de l’année, 150 plaisirs à découvrir. Décryptage des 17 premiers diffusés.

L’écrin du jeu

On s’attendrait à des visuels utilisant les codes publicitaires classiques du fromage (savoir-faire, affinage, tradition). Mais Roquefort Société provoque la surprise en décidant de communiquer avec des références au jeu, notamment au poker. En effet, l’arrière-plan vert des visuels (le vert étant, avec le blanc, les couleurs de la marque) rappelle la couleur du tapis de jeu, tandis que les trois cœurs évoquent une des quatre  familles d’un jeu de cartes, le visuel « Partie de plaisirs » étant illustré par des dés.

 

 

Outre ces clins d’œil au jeu, l’éclairage braqué sur le fromage rappelle l’effet parfois utilisé dans les jeux télévisés de poker. Lorsque vient le tour de jouer d’un participant, son jeu est subitement mis en lumière, ce qui force la concentration du spectateur sur un point précis.

Dans le secteur de l’alimentaire, Roquefort Société n’est pas le premier à avoir emprunté ces références. Avant lui, M&M’s et Leerdammer avaient exploité l’idée des jeux du casino (jeu de cartes, machines à sous, tapis vert, dés de fromage, joueur), dans leurs campagnes online.

Cependant, le style choisi (couleurs, images, mots) était très éloigné de celui adopté actuellement par le fromager. Nous trouvons effectivement chez Roquefort Société une esthétique estampillée « luxe » dans le traitement de l’image épurée, sans arrière-plan, ainsi que dans la présentation du produit. Positionné au centre de l’image, le fromage est magnifié, inondé par une lumière qui le sort de l’ombre, comme éclairé d’une lumière divine. Cette mise en scène théâtrale présente le fromage comme un véritable objet de luxe. D’ailleurs, le tapis de jeu vert n’est-il pas l’écrin d’un imposant diamant de roquefort ? ou bien celui d’un collier de haute joaillerie ?

Nous noterons que contrairement à M&M’s et Leerdammer, c’est en toute discrétion et de manière suggestive que Roquefort Société fait référence au jeu, dans la logique du style « luxe » choisi. L’attention reste focalisée sur le roquefort, objet d’excellence, seul acteur dans l’illustration du plaisir qu’il représente.

Le plaisir : terrain de jeu de Roquefort Société

Si Roquefort Société a décidé de jouer cette année, les visuels de la campagne publicitaire nous révèlent aussi que c’est au jeu de la séduction qu’il va se prêter. Séduire n’est-il pas un jeu comme les autres comme nous l’a démontré Ursula Andress dans un James Bond de 1967, Casino Royale ?

Pour 2013, Roquefort Société se positionne donc comme le maître de la séduction et du plaisir, et c’est au travers de plaisirs numérotés qu’il distribue les cartes… L’idée n’est pas sans nous rappeler les fameuses leçons chiffrées de la marque Aubade, qui mêle également le jeu de la séduction au luxe d’une lingerie fine et de visuels publicitaires hautement esthétiques. Nous verrons d’ailleurs que des détails de certaines publicités du fromager semblent directement empruntés à la marque de sous-vêtements, soit par l’image, soit par les mots employés.

C’est donc par un effet de style métaphorique que Roquefort Société illustre différents types de plaisirs. Une typologie se dégage de l’ensemble des formes qu’il emprunte. Ainsi, nous trouvons le sentiment amoureux dans les cœurs, déjà vus plus haut, la rose et le fromage offerts.

La rose s’invite chez Roquefort Société tout comme chez Aubade.

Puis, c’est l’engagement qui se déclare avec « Plaisir éternel », un gros diamant taillé en roquefort puis avec « Le joyau du plaisir », un collier précieux en roquefort.

Vient ensuite l’amour charnel avec « Aiguisez votre plaisir » où une pluie de couteaux Laguiole s’abat sur un demi-roquefort ; s’ensuit « Le sommet du plaisir » avec un pic de roquefort, tel un sommet de montagne.

C’est en forme de piment que le fromage continu son évocation sexuelle dans une « Explosion de plaisir ». De commun à Roquefort Société et Aubade, nous trouvons le piment, présent chez Aubade dans le titre de la leçon « Pimenter ses apparitions ».

Une sensation de vertige nous surprend avec le « Plaisir infini » : une succession de meules de roquefort déshabillées de leur étiquette. L’illustration se poursuit avec « Fondre de plaisir » où le roquefort prend la forme d’une boule de glace juchée sur son cornet.

La dernière typologie s’inscrit sous deux termes : la tentation et le péché. Nous les trouvons avec «Le chemin des plaisirs » qui prend la forme de tartines de pain beurrées généreusement de roquefort, et surmontées d’un fruit jaune, qui se succèdent en ondulant comme un serpent.

L’association de saveurs se fait avec le sucré sous la forme d’une tablette entamée, avec un mariage de carrés roquefort et chocolat, un véritable « Plaisir à croquer ». « Le fruit du plaisir » présente quant à lui une  grappe de raisin dont un grain, déjà détaché, appelle à être dégusté. «Un amour de plaisir » est enfin une pomme d’amour rouge verni, elle aussi déjà croquée.

La mention de l’interdit intervient au numéro 150, le dernier des plaisirs : « Plaisir défendu », pomme en roquefort, vierge de toute morsure gourmande.

Le plaisir : péché mignon de Roquefort Société

Outre les thèmes du jeu et du plaisir, Roquefort Société fait référence à l’histoire du péché originel. En effet, nous retrouvons le serpent tentateur dans « Le chemin des plaisirs » qui incite Eve à goûter la pomme du Jardin d’Eden, le fruit de la connaissance, dans « Plaisir défendu ». Puis l’interdit est transgressé dans «Un amour de plaisir », lorsque la pomme est croquée.

Roquefort Société nous rappelle que, selon la Bible, le péché originel commis par Adam et Eve, a permis la découverte des plaisirs terrestres comme la gourmandise et l’amour charnel. Par l’évocation de cet épisode bien inscrit dans notre culture, Roquefort Société nous dit qu’il est plus qu’un fromage. En s’incarnant tentateur, péché accompli puis en terminant comme « Plaisir défendu» (n°150), Roquefort Société nous invite à jouer avec lui en se laissant aller à une autre philosophie de vie, en transgressant l’interdit pour devenir hédoniste. Arrivé à la fin de la galerie des plaisirs, le fruit défendu est finalement toujours intact, personne n’y a encore touché. N’est-ce pas là le signe d’un éternel recommencement, de la possibilité de « refaire une partie » ?