Sémiosine

Dans la maison, de François Ozon : l’expression du désir

Dans la maison, de François Ozon, est un film sur le désir, son objet et sa médiation. C’est son affiche qui le dit.

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On voit…

une femme en arrière-plan assise sur le perron de sa maison. Toute petite chose perdue dans ses pensées, elle évoquerait le thème d’un tableau d’Edward Hopper si elle n’était pas observée par un jeune homme (Ernst Umhauer) au premier plan, assis sur un banc, lui-même fixé du regard par un homme plus âgé (Fabrice Luchini) assis près de lui.

On remarque…

que l’image est composée en miroir : les trois personnages sont assis ; le banc des uns renvoie au banc accolé au mur extérieur de la maison ; les deux têtes au premier plan se trouvent dans l’alignement des deux portes-fenêtres. L’homme se reconnaît-il dans le jeune homme ? Faut-il y voir un premier désir narcissique ?

On comprend…

qu’il s’agit de l’expression d’un désir et de sa triangulation, selon la théorie de René Girard. Tout désir est en effet l’imitation du désir de quelqu’un d’autre. Je ne désire pas l’objet en tant que tel, mais l’objet en tant qu’il est lui-même objet du désir d’une autre personne.

Sur l’affiche du film de François Ozon, la triangulation du désir est double : Fabrice Luchini, est le sujet voyeur qui, pour désirer la fiction, la maison, la femme, semble avoir besoin de la médiation du jeune homme, lui-même à la fois voyeur et objet désirable au visage dissimulé. Le spectateur a, lui, grand besoin de la médiation des deux hommes pour désirer la maison et la fiction. Il peut ainsi espérer y pénétrer, comme l’invite à le faire l’accroche, seul lien entre l’extérieur représenté par l’affiche et l’intérieur où va se jouer le drame : « Il y a toujours un moyen d’y entrer ».

Dans la maison, de François Ozon (2012), avec Fabrice Luchini, Ernst Umhaueur, Kristin Scott Thomas, Emmanuelle Seigner, Denis Ménochet, Bastien Ughetto – Mars Distribution – Coquillage d’Or au Festival de San Sebastian et Prix Fipresci au Festival International du Film de Toronto

2 réflexions sur “Dans la maison, de François Ozon : l’expression du désir”

  1. Jean-François Hans

    Dans la maison… mais laquelle ? Dans ce film comme dans les autres films de François Ozon (8 femmes, Potiche… et déjà dans le court métrage Un robe d’été), il est une autre maison au coeur du récit. L’une des réussites du film est le couple formé par Fabrice Lucchini et Kristin Scott-Thomas, lequel fonctionne comme dans les meilleures comédies américaines : les deux acteurs se donnent brillamment la réplique, lui en corrigeant ses copies sur la table de la salle à manger, elle confortablement installée sur le canapé du salon. Mais bientôt leur maison devient un lieu déserté dans lequel il ne se passe apparemment plus rien…

    Pour info : un autre film intéressant et tout entier dédié à la sémiologie : No de Pablo Larrain sorti le 6 mars.

    1. Merci, Jean-François, pour ce commentaire de cinéphile, et pour le conseil. Je n’ai pas encore pu voir No, mais cela ne saurait tarder.

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